Ça y est, nous y sommes enfin ! Le troisième et dernier volet du "Hobbit" est sorti officiellement en salle ce mercredi. Dire que ce film était attendu au tournant est un doux euphémisme, celui-ci ayant la lourde tache de conclure non seulement la trilogie du "Hobbit" mais plus globalement la saga de l'Anneau débutée en 2001 avec "Le Seigneur des Anneaux".
Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, "La Bataille des Cinq Armées" est probablement le dernier film adapté des écrits de Tolkien à voir le jour à l'écran. Effectivement les droits du "Silmarillion" et des "Enfants de Hurin", entre autres, n'ayant pas été cédés, et n'étant pas près de l'être, les héritiers Tolkien, Christopher Tolkien en tête, jugeant les adaptations de Peter Jackson de piètre qualité. Voilà pour la parenthèse.
Je tenais, avant de débuter réellement ma critique, vous rappeler que comme tout avis ce dernier est tout à fait personnel et complètement subjectif, loin de moi l'idée de l'imposer comme une vérité absolue, l'idéal étant de vous rendre en salle pour vous forger votre propre opinion. N'hésitez pas à ce propos à manifester votre accord ou désaccord par rapport aux points abordés dans les commentaires. Dernière précision : cette critique est basée sur la version 3D HFR française du film.
Revenons-en à nos moutons, que vaut ce film ? Tient-il toutes ses promesses ? Au risque de me mettre une grande partie des fans à dos, j'aurais tendance à répondre que non, en tout cas en l'état. Je dois avouer avoir été un peu déçu et frustré au sortir de la séance. Non pas que "La Bataille des Cinq Armées" soit mauvais, loin de là, il est même pétri de qualités, mais plutôt parce que mes attentes étaient très (trop ?) élevées et qu'elles n'ont pas été toutes comblées.
Avant de nous attaquer aux défauts du film commençons par mettre en lumière ses qualités.
Les points positifs
Une esthétique très réussie
Sur ce point il faudrait vraiment être mauvaise langue pour dénigrer le travail colossal abattu par les équipes de Peter Jackson, La direction artistique est une franche réussite. Les armures sont toutes plus belles les unes que les autres, mentions spéciales à celles de Thorin, Dwalin, Thranduil et Azog. Les armées des Elfes et des Nains des Monts du Fer respirent la classe.
Profitons-en pour nous attarder sur les design de Dain, dont la description qui en était faite jusqu'à présent pouvait en affoler certains et qui au final passe très bien. Même la fameuse crête ne choque pas. Au contraire son apparence est en parfaite adéquation avec le caractère à la fois farouche et excentrique du personnage.
Le maître-mot de la bataille est diversité. Dans les unités présentes : Gobelins, Orcs, Trolls (de taille normale ou géants), Ogres/Semi-Troll (on ne sait pas vraiment en fait), Aigles. Les montures : béliers, boucs et même cochon sauvage. Les lieux : l'affrontement n'a pas lieu uniquement devant la Grande Porte d'Erebor, comme c'est le cas dans le livre, mais aussi à Dale et au Mont aux Corbeaux.
Les effets spéciaux sont très impressionnants et sont sublimés par une mise en scène très inventive. Les angles de caméras sont très bien choisis et rendent les scènes d'action très immersives, à l'image de l'attaque du Dragon sur Lacville où le spectateur est vraiment plongé au coeur de l'action.
L'arc Dol Guldur : court mais intense :
Nombreux sont ceux qui attendaient le dénouement de l'intrigue autour du Nécromancien. D'une part parce que ce passage est à peine évoquée dans les écrits de Tolkien, mais aussi parce que la nature magique de l'affrontement promettait un spectacle époustouflant et surtout inédit. Je ne crois pas me tromper en disant que voir les membres du Conseil Blanc en action constitue le fantasme de beaucoup d'entre nous.
Qu'en est-il dans les faits ? Bien que ce passage soit relativement court je dois avouer l'avoir énormément apprécié. Voir Saruman, mais surtout Elrond et Galadriel combattre a quelque chose de jouissif,
Des acteurs impressionnants de justesse :
Les prestations des acteurs sont toutes de très bon niveau (même si les doublages français ne leur font pas forcément honneur, mais cela est un autre débat), mais celles délivrées par Luke Evans, Lee Pace et surtout Richard Armitage et Martin Freeman sont proprement impressionnantes. Le glissement progressif de Thorin vers la folie est interprété avec brio et de façon très subtile par le comédien.
À ce propos Peter Jackson a eu l'excellente idée de mêler la voix du Nain à celle de Smaug pour matérialiser à l'écran le mal du dragon.
J'ai beaucoup apprécié ses moments de complicités avec Bilbo, ses différents échanges avec Bard et son dialogue un peu houleux avec Dwalin. J'ai aussi particulièrement aimé la scène où le personnage se livre à son introspection dans la grand salle d'Erebor. Ceux qui ont vu le film me comprendront. Je ne vais pas énumérer toutes les scènes où apparaît l'héritier de Durin, mais sachez juste qu'elles sont quasiment toutes mémorables.
Martin Freeman quant à lui est attendrissant, pris en tenaille entre son amitié pour Thorin et son désir de vouloir éviter le conflit. D'ailleurs Peter Jackson a eu la bonne idée de donner plus d'importance au Hobbit durant la bataille.
N'en déplaise à certains, je n'ai pas trouvé l'idylle entre Tauriel et Kili si mièvre que cela. Les acteurs n'en font pas des caisses. Pas de longs regards langoureux ni d'effusions ici, le jeu des acteurs, notamment celui d'Evangeline Lilly est tout en finesse et en retenue.
Des duels au sommet :
Constituant le point d'orgue de la Bataille des Cinq Armées, allant même jusqu'à éclipser cette dernière, les duels se déroulant au Mont aux Corbeaux, et particulièrement celui opposant Thorin à Azog, sont vraiment excellents. Merveilleusement chorégraphiée, très inventive et magistralement mise en scène, chaque passe d'armes fait vibrer le spectateur de tout son être jusqu'au final haletant.
Les points négatifs
Un film charcuté :
Comme ce fut le cas pour
"La Désolation de Smaug", le montage est trop expéditif, ainsi certaines scènes sont anormalement écourtées. C'est le cas notamment de l'attaque de Lacville qui doit durer tout au plus 10 minutes. On peut d'ailleurs s'interroger sur la pertinence du choix de l'équipe scénaristique d'avoir voulu garder ce passage pour le dernier opus, tant celui-ci est vite expédié. Il aurait été plus sage selon moi de l'inclure dans le second épisode quitte à raccourcir un peu la séquence se déroulant dans les forges.
Pire, certains personnages ou scènes sont carrément aux abonnés absents. Ainsi durant la bataille, en dehors de Thorin, Fili, Kili et Dwalin, les autres Nains sont purement et simplement délaissés. Quelques plans, même furtifs, des membres de la Compagnie au coeur du combat auraient été les bienvenus. Quelques plans supplémentaires de Dain n'auraient pas non plus été de refus.
Autre problème, toujours concernant la bataille : les scénaristes ont voulu replacer certains personnages au coeur de l'intrigue, l'arc de chacun d'entre eux y trouvant enfin son climax. L'idée est certes intéressante mais du coup la bataille elle-même passe au second plan. Les mouvements de troupes, charges, montées ou non, et autres moments de bravoure des armées se comptent sur les doigts d'une main. C'est d'autant plus frustrant lorsque l'on sait que Peter Jackson est une pointure dans ce domaine et que de telles scènes, apparaissant dans le teaser trailer et le trailer, ont bel et bien été tournées. Ce défaut sera probablement corrigé par la version longue.
Enfin, pour en terminer avec la partie montage, des plans assurant la transition entre certaines scènes ou pour souligner certaines émotions font cruellement défaut.
La fin est trop abrupte voire bâclée... On ne sait pas ce qu'il advient de l'Arkenstone, qui est pourtant au coeur de l'intrigue, des pierres de Lasgalen, de Sauron. Beaucoup trop de questions restent en suspens pour le spectateur néophyte.
Encore une fois, je pense (j'espère) que Peter Jackson rectifiera le tir dans la version longue.
Legolas dans ses oeuvres
Qui dit Legolas dit legolasseries.
Une bataille colossale étant au centre de l'intrigue de ce dernier chapitre, nous nous doutions tous que Peter Jackson allait s'en donner à coeur joie concernant les acrobaties de son chouchou. Finalement le réalisateur est resté plutôt raisonnable... jusqu'à LA scène fatidique. Nous tenons ici certainement la scène la plus "what-the-fuckeste" des six films réunis. Après la partie de surf sur un bouclier à la Bataille du Gouffre de Helm, l'épisode où Legolas se farcit seul un Oliphant à la Bataille des Champs du Pelennor ou encore celui où il virevolte telle une ballerine sur la tête des Nains lors de la scène des tonneaux, le jeune prince elfe se prend pour Neo, défiant toute les lois de la gravité, en prenant appui sur les pierres d'un pont en train de s'effondrer... Devant un spectacle si affligeant je n'ai pu retenir un rire retentissant doublé de soupirs consternés.
Une VF catastrophique
Ce n'est pas nouveau, les doublages français du
"Hobbit", en comparaison de ceux du
"Seigneur des Anneaux", sont de piètre qualité. Pour cet épisode les comédiens de doublages on pourtant réussi à se "surpasser". Il suffit de comparer les passages aperçus dans les trailers et autres sneak peeks dans leur version originale et française pour se rendre compte que ces derniers perdent grandement en intensité. C'est d'autant plus flagrant pour ce qui est des répliques de personnages comme Thorin, Bilbo ou encore Bard, dont les prestations sont juste saisissantes en anglais et beaucoup moins, voire plus du tout, en français.
Mais le comble reste tout de même le doublage de Dain, La voix suraiguë roulant les r du cousin de Thorin, contraste furieusement avec son apparence farouche et son caractère téméraire.
Conclusion
Au final "La Bataille des Cinq Armées" est un très bon film, plombé par un montage foireux et des doublages français qui ne lui rendent pas honneur et qui libérera enfin tout son potentiel lors de la sortie de sa version longue en novembre 2015.
Comme je l'ai expliqué au début de ma critique, mon sentiment de frustration vient en grande partie de mes attentes, de toute évidence trop importantes, j'ai probablement trop fantasmé le film dans mon esprit avant d'aller le voir. Ceci explique peut-être cela. Quoi qu'il en soit, et pour ne pas rester sur une note négative, j'ai décidé de retourner le voir en version originale sous-titrée. Le recul et le côté authentique des interprétations, m'aideront certainement à revoir mon avis à la hausse.
En attendant, je vous donne rendez-vous dimanche 14 décembre à 20h00 pour un live au cours duquel l'ensemble des membres de l'équipe partageront leur ressenti avec vous, l'occasion pour nous tous de confronter nos opinions.
@dimanche, venez nombreux !